Quand je disais que la nuit serait compliquée !
dimanche 16 octobre 2022
3h30
J’ai dormi jusqu’à 2h, Béa est descendue se coucher.
Le vent avait bien baissé, à 8 noeuds, on s’attendait à passer sous moteur durant mon quart. On n’avançait plus qu’à 4,5 noeuds…
Le vent avait tourné de 30°, venait du 100.
On déviait donc pas mal vers l’Ouest une nouvelle fois.
Je décide alors de prendre un meilleur angle au vent et de reprendre une meilleure route. Je prends 90° par rapport au vent météo, on gagne 2 noeuds et on a une route moins directe mais qui me plait mieux.
Bon.
Comme ça avance bien et que le vent et autour de 10 noeuds, je décide de passer sous code 0. Un petit appui moteur pour garder de la vitesse et c’est parti.
De 6,5 noeuds pour 9,5 de vent on grimpe immédiat à 9,5 !
Et soudain, c’est le bazar : le vent météo monte en quelques minutes à 16 noeuds. Et passe presque au 180 (plein sud) alors que nous étions au 90 (vent d’est) il y a une heure à peine…
16 noeuds, c’est la limite théorique supérieure du code 0. Qui encaisse alors 20 noeuds en apparent, on file 10 noeuds.
Comme je crains que ça ne s’emballe, je décide de relâcher un peu la GV et le code 0 : 4 tours sur le winch ne suffisent pas à tenir la tension, l’écoute m’échappe de la main (sans bobo). La voile flotte au vent, je la reprends, la borde un peu mais pas trop.
Les choses rentrent dans l’ordre, le vent diminue, en apparent comme en réel.
C’est à se demander si le vent réel, calculé par la centrale de navigation, n’est pas fantaisiste.
Mais dehors, je vous le jure, ca soufflait bien !
30 minutes plus tard tout est calme, le vent a baissé à un peu plus de 7 noeuds, on avance a presque 7.
Quel bazar.
J’ai repris la météo : ce que nous rencontrons ne correspond pas aux prévisions, et donc c’est l’inconnue pour les heures à venir…
7h30. Dimanche : le vent est sous LSD !
Vous vous souvenez, sur le coup des 3h je vous parlais du code 0.
Je l’ai enroulé à 5h : plus de vent, moteur…
Puis le vent a tourné, est passé au sud, puis au SSW, pour revenir au 170. Pour rappel notre route est en principe au 210.
Béa n’a pas dormi : le bruit de les pas gérant le bateau cette nuit l’a gêné. C’est la première fois : peut-être un autre bruit. Elle dort à côté de moi dans le carré…
J’ai remis le solent vers 7h, et pris un angle de 45° au vent, vers l’est. On n’avançait qu’à 4 noeuds avec un vent de face de 10, au moteur, et je me suis dit que fichu pour fichu autant passer sous voiles.
Bah, ça a tenu même pas un quart d’heure ! Le vent est redescendu à 3 noeuds.
Je suis donc de nouveau au moteur, on avance à 5,5 noeuds avec un vent de face de 6. La GV est dans l’axe, elle n’aime pas trop ces conditions.
Et il pleut quelques goutes…
Encore 120NM a faire. Arrivée lundi matin.
Mais la météo nous réserve encore des surprises…
13h50.
Tout à l’heure, alors que nous observions le vent qui baissait aux alentours de 5 noeuds, nous avons pris conscience qu’il tournait aussi radicalement : il venait quasiment du plein ouest. Là où, dois-je le rappeler, les modèles météo récents le donnaient sud, voir sud-sud-est.
Bref, la conséquence, avec notre angle au vent avantageux, est que nous faisons désormais route vers … nulle part. Miami, peut-être.
Virement de bord : nous revoici sur une route moins exotique.
Oui mais le vent persiste à tomber, et souffle faiblement pile dans notre nez. Enfin, si nous faisions route vers Lanzarote…
L’heure estimée d’arrivée est passé à lundi soir !
Discussion dans l’équipage, vote, décision : on remballe tout !
J’ai pris la météo peu avant 13h : tout le monde est d’accord pour annoncer pétole et moteur jusqu’à l’arrivée.
Je sais, ça peut changer, mais depuis 3 jours c’est bien la première fois où ils sont tous d’accord…
Alors on se résous à augmenter les heures de notre moteur tribord.
Positivons : ça maintiens les batteries en charge. Et ça nous permet d’arriver demain matin de bonne heure.
On avance à 6 noeuds environ, avec un petit courant contraire.
La Graciosa, c’est pour demain !
18h30.
Le ciel s’est entièrement dégagé, la nuit sera étoilée et prometteuse.
Le vent est tombé, comme prévu. Un murmure de 3 ou 4 noeuds agite encore l’air ambiant, mais sans suffisamment de force pour agiter l’océan. La houle, à peine perceptible, berce Ti’amā lentement, sans que l’on puisse vraiment identifier le sens du movement. Pas de vagues, la mer est calme, lisse, paisible. Voilà bien longtemps que nous ne l’avions pas vue ainsi.
Au moteur, toujours, à un peu moins de 6 noeuds. Encore 70NM a faire, nous arriverons demain en début de matinée, l’heure idéale pour faire un bon mouillage.
Béa a fait deux lessives, j’ai préparé à manger, on a pris l’apéro : Coca pour moi, Schweppes agrume pour elle…
Personne autour de nous, nous sommes seuls au monde. Et c’est agréable…
Nos journées se passent en lecture et en repos. Guérilla 1&2 pour Béa, les nouvelles et romans de Philip K. Dick pour moi. Pas d’Internet, c’est sympa !
22h30, heure de Gibraltar, mais 21h30 heure des Canaries.
J’ai ralenti Ti’amā à un peu moins de 5 noeuds. Il reste environ 50NM à parcourir avant d’arriver à l’entrée du chenal entre les deux îles. Le soleil se lève à 9h (heure de Ti’amā), inutile de se dépêcher.
La nuit est belle, le ciel remplis de millions d’étoiles. Jupiter et Saturne illuminent le firmament.
Nous devrions arriver aux environs du lever de soleil, nous serons au mouillage une heure après.
La VHF annoncé deux embarcations à la dérive à l’Est-nord-est de Lanzarote, avec 40 personnes à bord. Des migrants. Il nous faudra être vigilants…
Lundi 17 octobre, 9h
On est arrivés au lever du soleil, 9h heure locale. Le mouillage a Playa Francesa est encombré, et la moitié de la zone est sur des rochers.
Première tentative : dérapage sur 25m, guindeau dévisse, câblot qui file et qu’il faut arrêter à la main, blocage du câblot en urgence avec les moyens du bord, examen du guindeau, revissage du couvercle, reprise du mouillage, changement de place et on se pose sur du sable, par 10m de fond…
On retrouve les copains d’Odin et de Mavisa juste derrière nous, Five et Summertime, ainsi que YEOMA partis de Gibraltar la semaine dernière.
Et Inajeen, que nous ne connaissons en fait pas.
Chose curieuse, il y a un autre catamaran « Ti’ama » un peu plus loin, et un grand monocoque rouge « Tiama »…